Au bassin à flot...

Au bassin à flot…

Elle l’attendait tous les matins
Dans ce bistrot, rue du bassin
Ce petit tabac-PMU
Dans lequel ils s’étaient connus.

C’était dans la froideur d’hiver
Et les dockers et les marins
Venaient se réchauffer d’un verre
Et des sourires des putains.

Elles s’appelaient Ginette ou Jeanne
Peu importait, car au comptoir
Devant leur bol de café noir
Elles redevenaient simples femmes.

Eux c’était José ou Abdel
Tous laborieux des nuits des quais
Mais dans leurs yeux elles étaient belles
Et leur corps semblait moins usé.

Mais pour Maria, cette aube là
Quand Mohammed passa le pas
Du carillon du « Petit Rouge »
Pour lui, elle oublia le bouge.

Puis leurs regards s’accrochèrent
Pendant des heures ils se parlèrent
Et quand midi sonna le glas
Ils se réchauffèrent de leurs bras.

Ils avaient vingt ans tous les deux
Chaque matin fut merveilleux
Deux semaines d’éternité
Transformant l’hiver en été.

Puis ce fut l’heure du retour
Mohammed jura son amour
A une Maria éplorée
« Je reviendrai, je le promets ».

Elle resta fille de rien
Arpentant les rues du bassin
Et chaque bateau algérien
Fit battre son cœur lourd en vain.

Elle l’attendit trente années
Sans jamais se décourager
Seules quelques larmes au petit jour
Rappelaient sa perte d’amour.

Elle mourut une nuit d’hiver
D’une pleurésie fort sévère
Sans savoir que son Mohammed
Depuis trente ans en terre du Bled,
Reposait en paix près d’Allah.

Il n’avait pas laissé Maria
A son retour cette année là
Ses frères avaient pris les armes,
Sans plus de justice que de larmes
Pour blasphème on le fusilla…

Photos et textes © L.C.

Comments

[Nicolas]

n'aurait pas fait mieux, parsemez de quelques notes...

[DoU]

J'a do re ...

[Fil]

..histoire

[Daizy (dées)]

et chair de poule... Mais je vous aime quand même aussi :0)

[zacki]

Peut-être auriez-vous vous du pousser la chansonnette pour mettre en trémolos vos jolis mots.